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Une moniale nous fait partager son espérance après un abus de l’enfance

De larmes et de roses, dans l’ardeur de vouloir vivre malgré tout

 

Le pardon de Dieu répare l’irréparable
En faisant fleurir, dans les cœurs                             
Où le péché a saccagé les roses du premier amour, 
Leur pureté et leur fraîcheur,                                                                     
Les roses sombres, parfois aussi belles,
Tantôt plus belles,                                                                                          
D’un second amour,                                                                                                 
Avec ses repentirs, ses larmes, ses ardeurs.

Cardinal Charles Journet

A toi, qui a vécu ce que j’ai vécu : un chemin de guérison est possible,
A celle qui m’a patiemment écoutée, accompagnée,
A toi qui m’a abusée et à qui j’ai pardonné, repose maintenant en paix.

Qu’est-il advenu des roses de mon enfance,
Ces boutons non encore éclos,
Et celles qui s’entrouvraient,
Ces roses blanches encore toutes imprégnées
de pureté et d’innocence ?

Ces roses étaient toute mon intimité,
Pourquoi t’en es-tu approché et as-tu voulu les toucher,
Alors qu’il y avait autour de toi
Tant de jolies roses dans la maturité de leur floraison ?
Pourquoi ?

Elles étaient encore si fragiles, si délicates,
En les touchant tu les as abîmées :
Tu en as arraché et froissé les pétales,
Brisé les tiges sans épines,
Tu as abîmé à jamais les roses blanches de mon enfance…

Et moi, je n’ai pas compris,
Comment l’aurais-je pu, si jeune ?
Sans méfiance, je t’aimais d’un amour d’enfant,
Mais je n’aimais pas quand tu touchais à mes roses…
Et ta parole continue à me hanter : « tu n’aimes pas… ? »

Violence de tes gestes sans violence !
Violence de tes paroles mielleuses !
Non, je n’aimais pas ce que tu faisais !
Et j’ai fini par ne plus m’aimer : 
Au plus vite enfouir et oublier l’insupportable… !

J’ai appris à en souffrir en silence :
Ma mémoire s’est tue mais mon corps parlait, hurlait sa douleur !
De moi-même J’abîmais les quelques roses
Que la vie malgré tout m’offrît !
A quoi bon les roses…

Quand ces souvenirs d’un lointain passé sont remontés,
Quand mes larmes ont coulé et que ma parole s’est libérée,
Un chemin de vie s’est peu à peu ouvert à moi.
Mais ce fut laborieux :
Tu avais tout brouillé !

Une merveilleuse thérapeute m’a patiemment écoutée,
M’a aidée à mettre en mots l’indicible.
Le sacrement des malades m’a apaisée :
Dieu a visité les profondeurs de ma blessure
Et y a fait fleurir … d’autres roses !

Aujourd’hui, je traverse encore des moments difficiles,
Mais je me réjouis que les roses sombres de l’épreuve traversée
Aient fleuri, « parfois aussi belles, tantôt plus belles »,
Dans les « larmes » parfois,
Mais dans l’ardeur de vouloir vivre malgré tout.

Une moniale